Un Comit interministriel sur fond d'incertitudes sur la fonction publique

Publish date: 2024-08-11


Dématérialisation, meilleure présence des services publics sur les territoires, gestion plus efficace de l'immobilier de l'État, maîtrise des normes, déconcentration des services de l'Etat, recours élargi aux contractuels… Il faut apparemment un peu de tout cela pour "transformer l'action publique".
Ces ingrédients et d'autres encore étaient en tout cas au menu très transversal du deuxième Comité interministériel de la transformation publique qui a réuni la plupart des ministres ce lundi 29 octobre autour d'Édouard Philippe. Près de neuf mois après la première édition de ce comité interministériel, il s'agissait de "partager" la "stratégie" 2018-2022 en faveur d'un "Etat efficace" et de services publics plus "accessibles" et plus performants. En se situant dans le sillage à la fois des travaux du Comité Action publique 2022 (dont le rapport dévoilé cet été par un syndicat n'a toujours pas été officiellement publié), de la concertation dédiée à la fonction publique… et des diverses "réformes structurantes dans de grands champs de politiques publiques". Des "plans de transformation" pour chaque ministère ont d'ailleurs été publiés pour l'occasion. Il s'agit en fait de fiches synthétisant le programme de travail de chacun, avec pas ou peu d'éléments nouveaux.

Déléguer "un maximum" au niveau territorial

A la suite du comité interministériel lui-même, Édouard Philippe s'est exprimé devant les principaux directeurs d'administrations réunis sur l'un des sites de Matignon. Le Premier ministre ne s'est pas attardé sur les mesures, insistant plutôt sur les objectifs – "transformer la façon dont l'Etat fonctionne" – et sur la nécessaire "qualité d'exécution" des décisions. "Nous attendons beaucoup de vous. Autrement dit, on va regarder avec beaucoup d'attention ce que vous faites, à intervalles réguliers", a-t-il prévenu.
Il a également mis l'accent sur les réflexions en cours devant permettre l'émergence d'une "nouvelle" organisation territoriale de l'Etat. Les préfets de région ont été invités à formuler des propositions. L'idée étant bien d'éviter toute concentration au niveau régional et de déléguer "un maximum de décisions et d'actions au niveau territorial". "Nous voulons clarifier les missions de l'Etat (…) et alléger son rôle dans les domaines où interviennent déjà des collectivités ou des opérateurs", indique aussi le dossier diffusé par Matignon. "Les choix seront annoncés d'ici la fin de l'année", a indiqué le chef du gouvernement.

Contractuels : "élargir" ou "généraliser" ?

Mais le plan gouvernemental était sans doute surtout attendu ce lundi pour son "volet boîte à outils" en matière de ressources humaines, selon la formule de Matignon.
"Nous allons accompagner cette transformation de l’action publique d’une transformation de la fonction publique", a affirmé le Premier ministre. L’objectif, a-t-il ajouté, est de "moderniser la fonction publique", de "faire en sorte qu’elle puisse apporter à la transformation de l’action publique toute sa compétence, toute sa souplesse, toute son inventivité et toute son énergie". "Nous allons évidemment le faire en privilégiant le dialogue", a-t-il indiqué, en rappelant que le secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics, Olivier Dussopt, a ouvert dès février dernier une concertation avec les représentants des syndicats et des employeurs publics sur ces évolutions. Celles-ci figureront dans un projet de loi qui "interviendra début 2019", a précisé Édouard Philippe. Le dossier de presse de Matignon indique de son côté que le projet de texte sera présenté au "premier semestre 2019".
La veille du comité interministériel, le ministre de l’Action et des Comptes publics avait évoqué la réforme de la fonction publique en des termes plus précis que le Premier ministre. Il avait aussi créé la surprise. En effet, alors que jusque-là le gouvernement déclarait vouloir "élargir le recours au contrat" dans la fonction publique, Gérald Darmanin a évoqué sur Europe 1 "la généralisation du contrat". "Nous garderons un statut", a-t-il toutefois insisté. En ajoutant que "c’est important de le garder pour une partie sans doute de la fonction publique, notamment les fonctions les plus régaliennes". "On laissera le choix aux agents publics. Ils pourront désormais prendre des contrats et venir pour cinq, pour dix, pour quinze ans dans la fonction publique", a-t-il encore déclaré. En expliquant que "les agents n’ont plus forcément envie de faire quarante ans de [leur] vie sous statut".

Partir... mais toucher le chômage

Toutefois, suite aux déclarations de son ministre, Bercy a précisé que le gouvernement comptait engager une "extension très large de la possibilité de recourir aux contrats" et a évoqué un "excès de langage" de Gérald Darmanin. Il n'y aura "pas de surprise", a par ailleurs assuré le secrétaire d'État, Olivier Dussopt.
On retiendra encore que, selon le ministre de l’Action et des Comptes publics, les plans de départs volontaires, que le gouvernement compte activer dans le cadre de la restructuration des services de l’Etat, offriront des possibilités de départ avec 24 mois de salaire et "la possibilité de toucher le chômage, ce qui n'était pas le cas jusqu'ici" pour les fonctionnaires. Le "fonds d'accompagnement de 50 millions d'euros centré sur les ressources humaines" de l'État pourrait financer, outre des reconversions, cette nouvelle indemnisation chômage, selon Bercy. Et une agence de reconversion pour les agents de l'État devrait voir le jour "au second semestre 2019", selon le plan gouvernemental.
Gérald Darmanin a également confirmé la volonté de l’exécutif de "rémunérer les agents au mérite". La semaine dernière, Bercy avait présenté aux représentants des syndicats et des employeurs publics les modalités qu'il envisage pour traduire cet objectif.
Sur ce dossier comme sur celui de "l’accompagnement des transitions professionnelles", le gouvernement pourrait faire connaître ses arbitrages lors d’un "point d’étape" prévu ce 30 octobre, en présence du secrétaire d’Etat en charge de la fonction publique.

De nouveaux "points de contact de proximité"

L'un des autres axes mis en avant par la "stratégie pour la transformation de l'action publique" est celui de "la présence des services publics sur le territoire", avec la volonté de miser sur "des accueils communs et mutualisés". A ce titre, plusieurs dispositifs sont mentionnés, dont l'expérimentation de nouveaux "points de contact de proximité" lancés sur trois territoires pilotes (Longny-au-Perche dans l'Orne, Béthune dans le Pas-de-Calais et le quartier États-Unis dans le Grand Lyon) et "l'enrichissement" de l'offre de services disponibles dans les maisons de services au public (MSAP).
S'agissant des relations avec les citoyens-usagers, on saura que la loi "société de confiance" doit s'accompagner d'un "baromètre de la confiance" pour les particuliers et les entreprises ou encore qu'un site baptisé "Vox usagers" permettra à chacun à partir de 2019 de faire part de ses expériences, avis et difficultés. Comme prévu, des "indicateurs d'efficacité" des services publics de proximité vont aussi être publiés d'ici la fin de l'année.

Mieux gérer le patrimoine immobilier de l'État

Le document de présentation de la stratégie inclut par ailleurs un calendrier de nouveaux documents qui vont être dématérialisés, dans le cadre de l'objectif d'atteindre 100% des démarches en ligne en 2022 : inscription en ligne sur les listes électorales en 2019, mise en place du bail numérique en 2020, guichet unique de création d'entreprise en ligne en 2021, etc.
Un autre volet concerne le patrimoine immobilier de l'État, vaste de 100 millions de mètres carrés, et qui induit 10 milliards d'euros de dépenses annuelles. Le gouvernement confirme un plan d'un milliard d'euros pour rénover les cités administratives vieillissantes. Il souhaite également développer la location plutôt que la cession de ses actifs, et mettre en place des "foncières" et des syndics pour améliorer la gestion du parc immobilier. "On garderait notre patrimoine pour faire de la recette budgétaire pour l'État, grâce à des professionnels chargés de le valoriser", selon Matignon.
Édouard Philippe a confirmé le prochain grand rendez-vous : avec Emmanuel Macron, il réunira une "convention des managers publics" avec quelque "1.800" préfets, directeurs d'agences régionales de santé, recteurs, patrons d'administrations centrales... Rendez-vous leur est donné le 12 décembre.

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