La Cnav et la Cnaf exprimentent un "forfait cohabitation intergnrationnelle"
Régulièrement mis en avant pour ses avantages – accès à une solution de logement peu coûteuse pour les étudiants et les jeunes, lutte contre l'isolement des personnes âgées... –, le logement intergénérationnel peine pourtant à décoller véritablement depuis de nombreuses années (voir nos articles du 10 mai 2016 et du 2 décembre 2010). Le contexte a toutefois changé avec l'article 117 de la loi Elan du 23 novembre 2018, qui sort le dispositif d'un entre-deux juridique en instaurant un cadre légal spécifique et dérogatoire : le régime de la cohabitation intergénérationnelle solidaire.
Donner un nouvel essor à la cohabitation intergénérationnelle
Cet article de la loi Elan "permet à des personnes de soixante ans et plus de louer ou de sous-louer à des personnes de moins de trente ans une partie du logement dont elles sont propriétaires ou locataires dans le respect des conditions fixées par le contrat de cohabitation intergénérationnelle solidaire prévu à l'article L. 631-17 du code de la construction et de l'habitation [introduit par l'article 117 de la loi Elan, ndlr], afin de renforcer le lien social et de faciliter l'accès à un logement pour les personnes de moins de trente ans".
Ce nouveau dispositif a été complété par un arrêté du 13 janvier 2020 instaurant une "charte de la cohabitation intergénérationnelle solidaire". Le nouveau cadre ainsi posé, il reste donc à relancer le dispositif, après la pause forcée de l'année 2020, peu propice à la cohabitation intergénérationnelle. La Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav) et la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) lancent donc l'expérimentation d'un "forfait cohabitation intergénérationnelle et solidaire". Cette expérimentation s'appuie sur le conclusions d'un rapport commandé à l'association Cohabilis, regroupant une quarantaine de structures "qui mettent en œuvre sur le terrain des solutions d'habitat partagé". L'étude portait plus précisément sur les leviers qui permettraient de développer la cohabitation intergénérationnelle.
Parcours client et Cross Canal
Le rapport met en évidence l'effondrement de la cohabitation familiale avec des proches de plus de 85 ans. En 1982, 29 départements comptaient plus de 35% de cohabitations avec un proche de 85 ans ; en 2011, on n'en compte plus un seul. Aujourd'hui, environ une personne âgée sur trois est isolée. L'étude de Cohabilis s'appuie à la fois sur une enquête qualitative auprès d'un échantillon de séniors et sur un travail auprès "d'organismes experts de l'accompagnement de jeunes".
Elle conclut à la nécessité de segmenter l'offre en trois cibles différentes, en fonction de l'âge de l'accueillant : la situation d'un jeune retraité n'a pas forcément grand-chose à voir avec celle d'une personne de 85 ans. L'étude de Cohabilis préconise par ailleurs une révision complète des concepts d'offre et des "parcours clients". Elle propose également, dans une approche très marketing, d'agir sur les "moments de vérité" - avec une attention particulière portée à l'expression des besoins et des attentes des seniors en termes de profil de jeune attendu (travailleur, étudiant, etc.) et en termes de contreparties (financières, présence, menus services) - et de développer une approche "cross canal" (communication et distribution faisant appel à plusieurs canaux). Enfin, l'étude préconise d'agir sur les leviers économiques, en maintenant et en structurant le modèle économique mixte privé (frais payés par les jeunes et les seniors, aides de partenaires privés) et public (subventions publiques).
Une formule "conviviale" et une formule "solidaire"
L'expérimentation lancée par la Cnav et la Cnaf va se dérouler dans onze départements (*) de trois régions selon le découpage de la Cnav (Aquitaine, Pays de la Loire et Rhône-Alpes), avec l'appui de la Carsat et de la CAF concernées. Elle s'inscrit très directement dans le prolongement de ce rapport. Avec toutefois une différence : là ou le rapport préconisait trois segments (offres "conviviale", "coup de pouce" et "solidaire"), l'expérimentation retient une segmentation duale : La formule "conviviale" pour les personnes autonomes seules et la formule "solidaire" pour les personnes en situation de fragilité. La cohabitation "conviviale" consiste en la mise à disposition d'une chambre, contre une "contrepartie financière modeste" et des moments de partage (repas discussion...). La contrepartie financière, inférieure aux prix du marché, est définie en fonction du territoire concerné. La cohabitation "solidaire" prévoit une participation aux charges modeste (au maximum 60 euros par mois), en contrepartie d'une "présence bienveillante en soirée" et de "menus services" convenus avec le jeune (par exemple, aller faire une course pour le sénior, fermer ses volets, réchauffer son repas ou sortir les poubelles). Tout au long de la cohabitation, Cohabilis accompagnera le jeune et la personne âgée.
De son côté, l'Assurance retraite prend en charge une partie des frais liés à la constitution de binômes comprenant un retraité de 60 ans et plus et un jeune de moins de 30 ans (étudiant, apprenti...). Il s'agit en l'occurrence des frais de constitution du dossier et des frais de suivi. Les retraités et les jeunes intéressés sont invités à prendre contact avec leur Carsat (ou leur CAF pour les jeunes) ou à s'inscrire sur le site de Cohabilis. Ils seront alors contactés par la structure la plus proche de leur domicile. Selon le communiqué commun de la Cnav et de la Cnaf, l'expérimentation se déroulera pendant un an – avant une probable généralisation – et comporte déjà 80 dossiers constitués.
(*) Drôme, Gironde, Isère, Landes, Loire, Loire-Atlantique, Pyrénées-Atlantiques, Rhône, Savoie, Haute-Savoie et Vendée.
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