Droit des architectes et droit des marchs publics, une conciliation difficile
Quelles sont les dispositions actuellement applicables aux droits de propriété intellectuelle des architectes à l'origine de la réalisation initiale d'un ouvrage public ? Répondant à une question parlementaire du député Michel Terrot, le ministre de la Culture a récemment apporté des précisions sur cette question qui se pose fréquemment lors d'opérations de rénovation.
Jusqu'à la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004, le maître d'ouvrage qui envisageait d'apporter des modifications à une œuvre architecturale devait donner priorité à l'architecte à l'origine de la réalisation. Ainsi, le maître d'ouvrage n'avait pas à lancer une consultation ni à recourir à une mise en concurrence. Cette priorité s'expliquait par le droit d'auteur dont l'architecte disposait sur l'œuvre.
Mais suite à la transposition de cette directive en droit interne, ce privilège de plein droit de l'architecte n'a plus cours. L'article 35 II 8° du Cde des marchés publics limite en effet désormais "le recours à un marché négocié sans publicité préalable et sans mise en concurrence, à l'existence de droits exclusifs". Or il s'avère que de tels droits d'exclusivité sont rarement reconnus aux architectes.
En cas de litige, il suffira au maître d'ouvrage d'apporter la preuve que les modifications réalisées sur l'œuvre architecturale sont ou étaient rendues "strictement indispensables par des impératifs esthétiques, techniques ou de sécurité publique, légitimés par les nécessités du service public". Le ministre de la Culture recommande toutefois au maître d'ouvrage d'informer le maître d'œuvre initial des modifications qu'il entend apporter à l'œuvre, conformément aux indications du CCAG-PI (cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestation intellectuelle).
L'incidence de ces dispositions pour les architectes s'avère importante, non seulement parce qu'ils risquent d'être écartés d'un certain nombre de marchés mais aussi, comme le soulignait en mars dernier l'Ordre des architectes dans une lettre au ministre de la Culture, parce que leurs réalisations risquent de perdre "leur identité et leur caractère original au prétexte d'une rénovation conduite au mépris des principes de base du droit moral des auteurs" (voir ci-contre notre article du 11 mars).
L'Apasp
Référence : Question du député Terrot en date du 20 décembre 2011
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