Contre les crues, Millau largit le lit majeur du Tarn
À Millau, capitale historique du gant, le Tarn qui borde la ville fut longtemps un exutoire pour les quelque 150 usines qui travaillaient le cuir au début du XIXe siècle. Bien après leur disparition, ce sont les infrastructures routières qui se chargèrent de couper la ville de sa rivière : la nationale 9 (aujourd'hui départementale 809) était en effet très empruntée par les vacanciers en partance pour le sud. Tout cela, c'était avant le viaduc de Millau. Ouvert en 2004, il a détourné une partie du trafic routier et "libéré" Millau de ses voitures, lui permettant de regarder à nouveau vers le Tarn.
En 2016, le conseil départemental de l'Aveyron décide de réaménager en boulevard urbain la route départementale 809 qui contourne la ville, permettant de nouvelles liaisons directes du centre-ville vers la rivière. Profitant de cette opportunité, la communauté de communes de Millau Grands Causses et la ville de Millau lancent alors une opération de requalification des berges du Tarn qui bordent la départementale. L'objectif est double : redonner à la rivière un espace de mobilité qui améliore son fonctionnement physique et proposer de nouveaux espaces de détente et de loisirs.
- Murs de béton et 21.000 m3 de remblais retirés du lit du Tarn !
Au fil des ans, "le lit majeur avait été en partie remblayé et le Tarn s'était déplacé en érodant la rive gauche", précise le technicien rivière à la communauté de communes Millau Grands Causses, Florian Fergeault. Le projet vise donc à "redonner à la rivière un espace suffisant pour entraîner les matériaux solides qu'elle transporte, dissiper son énergie, sa force érosive et limiter les dégâts lors des épisodes de crues". Pour cela, les travaux menés au printemps 2017 par la communauté de communes ont permis de retirer du lit majeur une bretelle routière de 1 kilomètre et ses murs de soutènement. Les berges ont été abaissées et remodelées, leurs profils adoucis et une saulaie a été plantée. Au total, 21.000 m3 de remblais "non sains" ont été retirés de la rivière, rendant le site plus perméable et plus inondable.
Le remodelage de l'espace réalisé, la communauté de communes a remis l'ensemble à la ville de Millau, qui s'est chargée de son équipement et de son embellissement paysager. Le rideau végétal a été étoffé en bordure du boulevard urbain, des voies douces accessibles aux personnes à mobilité réduite créées, une aire de jeux pour enfants installée. L'été, une plateforme permet d'accueillir un snack-bar concédé à un opérateur privé. Une baignade surveillée est aussi proposée en bord de rivière. Cet aménagement nature se prolonge depuis l'été 2019 par la transformation en parc urbain des quais voisins Sully Challies et de la Tannerie. Cette réalisation a permis de créer des gradins ouvrant la vue sur la rivière et de faciliter l'accès des piétons en pied de quai.
- Compromis nécessaires en secteur urbain
Si le Tarn a bien retrouvé un espace supplémentaire, l'aménagement du Gourg de Bade résulte d'un compromis entre ce qui est idéal pour la rivière et les contraintes du milieu urbain. "Pour protéger la culée du pont, nous avons dû conserver une partie de l'enrochement qui a été doublé d'un génie végétal" souligne le technicien. De même, les pistes cyclables sont en béton pour faciliter leur nettoyage après les crues. À l'inverse, aucun sable n'a été apporté sur la plage : "c'est une baignade en milieu naturel et il faut faire œuvre de pédagogie auprès des baigneurs. Comme leur expliquer l'importance de la végétation pour conserver une eau fraîche, indispensable par exemple à la présence de la truite". Deux ans après la finalisation du projet, l'aménagement fait ses preuves. "Mais il n'a pas vocation à lutter contre les inondations trentennales." Pour cela, des opérations à visée hydraulique ont été engagées : réouverture de bras morts d'un affluent amont du Tarn, création d'une arche nouvelle sous un pont ou aménagement de champs d'expansion des crues.
- Projet vitrine pour tout le "Tarn amont"
L'opération du Gourg de Bade constitue un maillon du programme pluriannuel de gestion du Tarn (PPG). Deux autres sites prioritaires ont été identifiés sur le territoire de la communauté de communes ; les enjeux fonciers y sont conséquents et ces projets ont donc nécessité plus de temps pour aboutir. En 2020, une opération trois fois plus coûteuse sera ainsi engagée à 12 kilomètres en amont de Millau, avec le déplacement d'un camping. "C'est le syndicat mixte du Tarn Amont, à qui nous avons délégué la compétence Gemapi, qui en aura la responsabilité. Et le Gourg de Bade sert de vitrine concrète pour faire comprendre les enjeux", conclut le technicien.
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